5/ Et par la suite...
Très vite, l’observation en "fond noir" de prélèvements frais, non fixés, s’est révélée la plus efficace pour le repérer car sa mobilité est caractéristique autant que sa forme en tire-bouchon. Du coup, cette méthode déjà connue mais plutôt peu utilisée et n'ayant guère suscité de progrès techniques a connu un vif regain d'intérêt et s’est répandue comme une traînée de poudre.
Les fabricants de microscope ont alors rapidement mis au point des condenseurs à miroir permettant son application jusqu’aux forts grossissements.

Il est à remarquer, sans approfondir la question, que parmi les spirochètes se trouvent plusieurs bactéries pathogènes : outre divers tréponèmes, certaines leptospires [ L. interrogans... ] et certaines espèces de Borrelia, généralement de dimensions supérieures à T. pallidum. [ Borrelia burgdorferi est responsable de la maladie de Lyme et Borrelia recurrentis, transmise par le pou, est un agent de fièvre récurrente. ]
En 1928, Charles Nicolle, encore un postorien, a reçu le prix Nobel de physiologie ou médecine pour ses travaux sur le typhus et – pour la petite histoire – il a proposé avec Alfred Conor, en 1913, un vaccin contre la coqueluche... dont Jules Bordet avait découvert le responsable [ Bordetella pertussis ] en 1906. Ce vaccin, toutefois, ne rencontra pas les attentes.
À propos des progrès de la médecine, Charles Nicolle a écrit * : « Le bond en avant, la conquête sur l'inconnu d'hier, est un acte non de raisonnement, mais d'imagination, d'intuition ; c'est un acte voisin de celui de l'artiste, et du poète, un rêve qui semble créer. »
Depuis 1902, Charles Nicolle était à la diection de l'Institut Pasteur de Tunis.
Identifier un agent pathogène n'est déjà pas mince affaire ; il faut aussi comprendre comment il se propage.
Alors qu'Alphonse Laveran avait décrit, dès 1880 en Algérie, le trypanosome qui cause le paludisme [ un eucaryote, pas une bactérie ], Ronald Ross ne pourra confirmer qu'en 1897, en Inde, son mode de transmission par le moustique anophèle ! Mais là, on s'écarte du sujet...
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L'équipe de Charles Nicolle s'est, entre autres, attachée à découvrir le vecteur de la fièvre récurrente. Nous voici en 1910 :
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[...] Il faut dire ici le rôle que joua, en cette affaire, une jeune recrue de l'équipe tunisienne, Ludovic Blaizot, qui arrivait alors de Paris avec l'accent normand, une fraîche mais déjà solide érudition zoologique et parasitologique, « un prix de thèse » flambant neuf et surtout – c'est là qu'il entre en scène – une connaissnce des techniques nouvelles, notamment celle du microscope à fond noir sans lequel on eût cherché encore longtemps. Sous ce microscope, qui allait faire merveille, que vit-on en effet ? Le cycle de transformation des spirochètes...
* [ Charles Nicolle et la biologie conquérante, Germaine Lot, éd. Seghers / Savants du monde entier, n° 4, 1961, pg. 51 ]
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Tout de suite après la deuxième guerre mondiale, c'est par la technique du contraste de phase que les microscopistes seront conquis. Jules Bordet en apprendra les avantages mais ne pourra plus en profiter en raison du déclin de sa vue.
Ironie du destin, il ne connaîtra jamais celle liée à... l’immunofluorescence.

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